La crise initiale se calme. Des mesures de quarantaine permettent de contrôler la contagion. Le nombre de queues molles croît néanmoins toujours. Heureusement, les techniques perfectionnées dans le domaine des naissances artificielles et le nombre presque illimité de spermatozoïdes congelés font en sorte que le risque d'extinction de l'espèce soit négligeable. Le plus grand souci de la population demeure donc celui de la satisfaction sexuelle. Chez les hommes, il s'agit de trouver une manière chimique de stimuler les régions érogènes du cerveau. C'est une entreprise difficile, un défi que la science n'est pas encore en mesure de relever. On se contente donc de fournir aux hommes, légalement, des drogues euphorisantes qui engourdissent le sentiment des désirs inassouvis et de l'angoisse suicidaire. Quant aux femmes, certaines se plaisent entre elles, d'autant plus qu'elles accèdent maintenant et pour la première fois aux postes de pouvoir, provoquant la première utérocratie depuis l'île de Lesbos et les Amazones. Le phallus en sérieux complexe d'infériorité, les femmes et la féminité jouissent d'un prestige jusqu'alors inconcevable. De nombreux gratte-ciel sont démolis, remplacés par des structures oblongues et ovoïdes (transformation qui aurait autrefois provoqué un entassement humain d'envergure meurtrière mais qui, en raison du taux de suicide record (30% de la population) ne cause que très peu de remous, et ce, surtout idéologique).

En l'absence de la présence active et énergisante du membre mâle, les femmes comme les hommes éprouvent des assauts chroniques de nostalgie phallique. Où est ce précieux talisman, cette divine perche, source de vie et de force ? Une atrophie de vitalité accable la conscience collective. Afin de remédier à la situation, les scientifiques, les prothésistes, les pharmaciens et diverses organisations sociales joignent leurs efforts.

De nombreux engins phalliques sont créés, testés ...