Janvier 2002, Montréal

Aujourd'hui, je suis revenue de New York où j'ai vu la blessure. Elle était sèche, s'effritait et sentait mauvais. À travers les fentes minces d'une haute palissade, j'ai pu voir les fondations rocailleuses remplies de débris. Après quatre mois, le feu couve encore sous le sol. Au-dessus du sol, les façades des édifices aux fenêtres brisées ont été noircies par le feu. Au-dessus du sol, tout est noir. Les vendeurs ambulants vendent déjà des photos-souvenirs et des casquettes portant l'inscription " ground zero ". Des touristes posent en souriant devant des appareils photo jetables. Il a fallu quatre mois avant que je ne puisse regarder cette terrible cicatrice. Ma première réaction a été une envie de vomir, ensuite mon instinct m'a dirigée vers l'eau. Je me suis assise sur un banc et j'ai prié. J'ai regardé la statue de Madame Liberté et j'ai pensé aux mots de Tennyson selon qui la liberté est indispensable.
" FREEDOM IS A MUST. "
Ce n'est pas une question ni une réponse.
La liberté est absolument nécessaire.
Elle bout à l'intérieur de nous en suscitant la création.
Il n'est pas possible de suturer la blessure.
D'elle sortent la vérité, la poésie et la connaissance.
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